The idea of Africa (re-invented)

20.05 — 31.07.2011

THE IDEA OF AFRICA (re-invented) est une exposition conçue en plusieurs volets par Philippe Pirotte pour la Kunsthalle de Berne dont il est directeur. Son postulat de départ a été la confrontation du public aux divers préjugés qu’il peut avoir au sujet de l’identité africaine. Le CPG présente le chapitre consacré à la mégapole de Lagos, capitale du Nigéria, dont une représentation par Armin Linke figurait déjà dans PANORAMIC SCIENCES.

L’exposition au CPG, THE IDEA OF AFRICA (re-invented), essaie de saisir les structures architecturales, politiques et géographiques de Lagos grâce au médium de la photographie. Les deux approches qui sont proposées sont de l’ordre du documentaire. Le collectif d’artistes « Invisible Borders » se confronte, dans une sorte d’« auto essai », aux frontières politiques du continent africain. J.D. Okhai Ojeikere, quant à lui, poursuit, depuis plusieurs décennies déjà, son étude photographique des développements urbains de la ville de Lagos. Ainsi, l’exposition inclut des points de vue et des schémas de pensée tout à fait courants dans la photographie traitant de l’Afrique et en provenance d’Afrique, caractérisés par des perspectives difficiles autant pour l’artiste que pour le spectateur et par une orientation temporelle particulière.

L’exposition est complétée par la diffusion du film LAGOS WIDE & CLOSE que Bregtje van der Haak et Rem Koolhaas ont réalisé ensemble pendant un séminaire dans cette capitale.

Le titre de l’exposition est emprunté à celui d’un livre écrit en 1994 par le philosophe congolais Valentin Yves Mudimbe. L’auteur essaie d’y (dé-)montrer comment notre image du continent africain est encore formatée aujourd’hui par l’idéologie des pouvoirs coloniaux occidentaux. La démarche de Mudimbe est unique dans le sens où il prend en considération un corpus de sources très hétérogènes, allant de l’Antiquité grecque à l’art primitif du 20ème siècle, de l’art contemporain africain aux théories structuralistes de Michel Foucault.

J.D. Okhai Ojeikere : Lagos, Invisible Borders J.D. Okhai Ojeikere est né en 1930 à Ojomu-Emai dans la partie occidentale du Nigéria. Il vit et travaille depuis l'âge de trente ans à Lagos. À partir de 1968, en tant que membre du Nigeria Art Council, une structure qui organise des festivals d'arts visuels et d'arts vivants, son intérêt se porte sur la culture nigériane. Pendant trente ans, il poursuit ses recherches dans tout le pays et les organise par thèmes. Mais c’est la série « Hairstyles » de plus de 1’000 clichés reproduisant des coiffes de femmes des plus fantaisistes, montrée au Mamco à Genève en 2001 et à la « Documenta 11 » à Kassel en 2002, qui le rend célèbre. Ainsi son travail qui accompagne les développements urbanistiques de la plus grande mégapole de l’Afrique subsaharienne – donc aussi traversé par la décolonisation – est resté assez méconnu, tout comme son archive, qui compte plus que 10'000 négatifs. Les vues de Lagos d’Okhai Ojeikere sont dénuées de tout exotisme, du moins dans le sens qu’elles ne produisent pas sur un public européen (voire occidental) un effet de distanciation immédiat. Ses photographies témoignent de la récente histoire architectonique de Lagos ; nous percevons surtout une ville marquée par le modernisme et par un environnement urbain typique de la deuxième partie du 20ème siècle. Quelques palmiers et, parfois, une curiosité architecturale indiquent que les prises de vue ont été réalisées dans un passé récent et dans une ville du sud. Mais comme Ojeikere maintient les Lagosiens presque toujours hors champ, le spectateur ne peut déterminer le site dont il s’agit. Ce n’est qu’en considérant les détails, tels que les panneaux de circulation, que nous nous rendons compte que nous sommes au Nigéria. La plupart des photographies ont été prises dans les années 1960 et 1970, une époque déterminante marquée par l’indépendance et oscillant entre un interventionnisme (ou un mécénat) occidental et un renouveau national. Dans l’élan de la constitution d’une nation, les arts ont eu une place importante. Ils se sont vus favorisés et subventionnés ; le sujet s’est reconstruit à partir de notions modernes. Les photographies d’Ojeikere ont l’ambition de déterminer l’exclusivité de l’interprétation de leur propre histoire et donc de maîtriser le présent. C’est le moteur de cette belle série « Lagos » où la mégapole apparaît, à l’encontre de tous préjugés, comme une ville attractive.

INVISIBLE BORDERS (Avec Amaize Ojeikere, Ray Daniels Okeugo, Uche James-Iroha, Lucy Azubuike, Charles Okereke, Uche Okpa-Iroha, Chidinma Nnorom, Emeka Okereke, Adenike Ojeikere, Unoma Geise and Chriss Aghana Nwobu) C’est en novembre 2009 qu’un groupe de dix photographes, cinéastes et écrivains entreprenait un voyage dans un bus de location entre Lagos et Bamako, capitale du Mali. Le but était de présenter à l’issue du voyage une documentation artistique destinée à la Biennale africaine de la photographie qui se tenait à Bamako. En apparence, la globalisation semble faciliter la mobilité des Africains, mais ceux qui se déplacent comme l’ont fait les membres de « Invisible Border » découvrent une autre réalité. Le collectif d’artistes a porté un regard critique sur les problématiques inhérentes à tout déplacement sur le continent africain par voie terrestre. En optant pour cette voie, ils ont contourné le passage souvent obligé par Paris de ceux qui voyagent en avion d’un point à l’autre de l’Afrique et ils ont aussi mis à l’épreuve le traité de libre échange ECOWAS de 1990. Mais leur voyage fut motivé par le souhait d’éprouver les « frontières invisibles » (invisible borders), des frontières qui ne correspondent à aucune spécificité géographique, mais qui ont été fixées par un service de planification et sont invisibles depuis un avion. La réalité du passage d’une frontière – l’humiliation, la bureaucratie, la corruption et la criminalité – ne se laisse expérimenter que par le voyage terrestre. Ce n’est que plusieurs mois après cette première expérience que le collectif entamait un deuxième voyage, cette fois-ci de Lagos à Dakar. Leur but était de se rendre à « Dak’Art 2010 – The Dakar Biennal for Contemporary African Art ». Ne seront présentés au CPG que les travaux issus de leur dernier voyage, sous la forme de photographies, de films et de textes. Le public peut suivre le travail de ce collectif interdisciplinaire à cette adresse : www.invisibleborders.blogspot.com.

Rem Koolhaas et Bregtje van der Haak - LAGOS WIDE & CLOSE En tant que plus grande ville portuaire, Lagos est le centre économique du Nigéria et l’on estime sa population (grande périphérie incluse) à 15 millions d’habitants. Malgré le taux élevé de criminalité, malgré les problèmes d’assainissement et le manque d’électricité et d’eau potable, la ville grandit à un rythme exponentiel si rapide qu’en 2020 elle sera probablement la troisième ville du monde. Pourquoi et comment peut croître une ville qui lutte sans cesse contre de tels problèmes ? L’architecte Rem Koolhaas, directeur de recherche pour l’urbanisme à l’Université de Harvard, étudie notamment la logique qui se cache derrière l'activité d’une ville aux dysfonctionnements aussi flagrants. En menant ses recherches, Koolhaas a rencontré une population dont l’inventivité et la capacité d’improvisation lui permet de surmonter les obstacles d’un paysage urbain des plus complexes. Il a invité en 2001 la documentaliste Bregtje van der Haak à mettre sous forme cinématographique le résultat de ses recherches à Lagos. Au final, un documentaire interactif intitulé LAGOS WIDE & CLOSE a été conçu avec le matériel cinématographique très riche que la réalisatrice avait constitué. LAGOS WIDE & CLOSE distingue les vues panoramiques, souvent enregistrées en grand angle, et des plans intimes et serrés de la ville. Plutôt qu'une narration dramatique, l’installation propose au public une sensibilisation autour des notions vivre et travailler à Lagos. Le film transperce les différentes strates de cette ville, suit les routes empruntées par le chauffeur du bus Olawole Busayo ainsi que par d’autres habitants et dévoile lentement le sens qui se cache derrière les codes qui régentent la vie quotidienne à Lagos. Proposant une documentation sur une ville ignorée par les médias occidentaux – mis à part lors de quelques événements religieux ou putschs militaires –, l’installation est une invitation à observer et à écouter la ville de Lagos à un moment où l’énergie d’une transformation en profondeur offre un aperçu des forces incontrôlables de l’urbanisation.

commissariat : Philippe Pirotte (en collaboration avec la Kunsthalle Bern)


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